Assurément, le sommet Biden-Poutine de ce jour à Genève doit rappeler certains souvenirs aux plus de 45 ans. En 1985, la rencontre Reagan-Gorbatchev avait eu lieu à la Villa Fleur d’Eau de Versoix, dans un contexte de fin de Guerre Froide. Un tête-à-tête entré dans les manuels d’Histoire… Aujourd’hui, la Cité de Calvin a une nouvelle opportunité de marquer son temps, et elle aurait tort de s’en priver. Les retombées seront d’abord pour la Genève internationale, privée depuis le début des années Trump de sa « diplomatie des bons offices » (voir le CCIGinfo de janvier 2021). Car n’oublions pas qu’une telle dynamique peut remplacer des mois d’efforts diplomatiques de nos organisations internationales. Les retombées seront aussi économiques. « Ce sommet n’effacera pas 500 jours de disette pour l’hôtellerie, mais donnera un coup d’accélérateur à la reprise », ai-je mentionné aujourd’hui encore dans les colonnes de l’Agefi. Mais les cinq-étoiles notamment se frottent les mains en recevant des centaines de représentants des délégations et des médias. Si l’on se base sur 6000 nuitées à 650 francs la journée (avec nourriture et frais divers), et tout ce que cela engendre en prestations annexes, l’impact financier est de l’ordre de 4 à 5 millions. Les taxis, restaurants et autres services retrouvent d’un jour à l’autre une clientèle étrangère de choix. Et que dire des retombées touristiques : les télévisions du monde entier retransmettent des images de la Rade, de ses grands parcs et de sa nouvelle plage sous une météo de carte postale ! Alors bien sûr, aux yeux de la population et des livreurs entravés dans leurs déplacements, ces efforts protocolaires ostentatoires dérangent le quotidien. Mais l’effort en vaut la peine, la CCIG en est convaincue. Et au-delà de ce marketing, que peut retirer Genève, et la Suisse en général, de l’événement ? Pour de nombreux observateurs, la neutralité helvétique trouve ici un écho positif. Il y a quelques temps encore, l’échec de l’accord-cadre européen ou les propos de Joe Biden qualifiant la Suisse de paradis fiscal ne faisaient pas une publicité reluisante à notre pays. Sur ce dernier point, la rencontre du président des Etats-Unis avec les autorités helvétiques a d’ailleurs été l’occasion de s’en expliquer de vive voix. Certes, pour le reste, l’accord de libre-échange Suisse-USA ne sera pas signé dans la foulée. Quant à la Russie, la Suisse entretient avec elle des relations solides, de confiance, depuis des décennies. Mais l’essentiel du sommet du jour se situe ailleurs : Genève accueille à nouveau un sommet hors norme dans un contexte de retour à la normalité, au sortir de l’interminable crise Covid. Le hors-norme s’inscrit ainsi dans la normalité retrouvée.